Je n'écris pas ma thèse, je la fais

Un jour #

  J'écrirai ma thèse. 
  Je me mettrai vraiment à un bureau avec un fût de fumant café  
  Je limerai mes ongles sur le clavier dans un rythme frénétique
  Je relirai des pages éparses écrites dans la fièvre de la nuit devant une nouvelle aube qui, par l'entremise de ses rayons, annoncera au monde la victoire sur une procrastination. 

Mais pour l’instant, ma thèse, je la fais.

  Je suis bien à bureau avec tonnelet de café
  J'use bien mes empreintes sur le clavier
  Je relie beaucoup de pages 
  J'ai parfois des montée de fièvre
  et l'aube se lève bien nouvelle tous les jours. 

Je ne suis pas encore mûre pour figurer la littéraire attablée quotidiennement, entourée de livres ouverts. Je suis pour l’heure entourée d’écrans, de divers éléments qui scandent ma journée (nécessaire de fumeuse, collations, notes de défoulement). Je suis pour l’heure en train de chercher où je vais écrire, de m’y projeter, de m’y décider.

Je peux écrire partout

 train en marche, bus en route, voiture en dérapage 

avec n’importe quel assise

table de bureau universitaire, table de café, guéridon d'un appartement inconnu

mais pas n’importe où.

Je ne peux pas écrire ma thèse dans Word ni dans Stylo ni dans VsCodium1. Ma recherche est donc celle d’un lieu de rédaction.

Chercher où écrire #

dans quel(s) environnement(s) d’écriture ? avec quel(s) outil(s) d’édition ? pour produire quelle(s) forme(s), créer quel(s) genre(s) d’objet ?

Particulièrement attirée par toutes les hybridations du texte, mélange des standards de structuration, croisement interopérable des formats, bricolage des médias, la question de ma table d’écriture se pose d’autant plus qu’elle définit en fait ma problématique de recherche.

Si je veux prouver qu'écriture et technique sont indissociables, 
il vaut mieux que je réfléchisse correctement en amont à la matière/forme technique de mon écriture. 

Ce préléminaire inclut plusieurs temps : formations à des outils, observations de pratiques d’écriture multiples, détournement des outils pour exprimer mes propres pratiques.

Le temps long #

La temporalité de ma thèse semble à première vue occupée à tourner autour de mon sujet, à y insuffler des idées, des remarques sans être officiellement dedans, comme flirter avec le vide pour y sauter pile au centre. Il m’apparaît que l’objet final, le produit estampillé “travail de thèse pour statut de docteur en Littératures de langue française”, sera le résultat des points de contact entre des intérêts de recherche et les nombreuses activités (colloques, groupes d’écriture, performance, brainstorming, ateliers) qui m’ont occupée jusqu’ici.


En écho j’ai menti


  1. Peut-être, à la limite, dans TextEditor. ↩︎

CC BY-NC-SA Antoine Fauchié